CUISINE ET GASTRONOMIE MEDITERRANEENNE...

L'huile d'olive espagnole vient défier les AOC de Provence1 contribution Publié le samedi 21 mai 2011 à 17H17

Une campagne promotionnelle lancée par les producteurs ibériques fait étape en Provence

Quand un Espagnol consomme, en moyenne,
14 litres d'huile d'olive par an, un Français plafonne à peine à 2 litres.
Difficile donc de jouer dans la même cour.

"Et ben ils sont pas gonflés, de venir faire leur pub chez nous!" Yves Bernard est oléiculteur à Berre et président du Syndicat des producteurs d'huile d'olive AOC Aix-en-Provence. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que la venue du "Roadshow de l'huile d'olive méditerranéenne", opération de promotion estampillée producteurs espagnols, le laisse un brin marri.

Le bus de la tournée s'est élancé le 13 mai du Lot-et-Garonne, a poursuivi sa route par les Hautes-Pyrénées, l'Hérault et le Gard, doit passer par Marseille du 23 au 25 mai... Avant de poser ses bidons et bouteilles d'huile d'olive espagnole les 27 et 28 mai sur le parking de l'hypermarché Géant d'Aix-en-Provence.

L'opération a été lancée l'an dernier par l'interprofession des oléiculteurs espagnols et cofinancés par le ministère de l'Agriculture ibérique et l'Union européenne. En 2010, le bus de l'huile d'olive a déjà sillonné le nord de la France et le Royaume-Uni. Et a donc croisé peu d'oliviers sur sa route.

Mais cette année, il entre de plain-pied dans les terres oléicoles françaises. "Ils nous auraient prévenus, pour nous associer à la démarche, passe encore, on fait souvent des dégustations avec d'autres zones de production, mais là, c'est vous qui nous l'apprenez", s'énerve Yves Bernard. Stéphanie Delaye, animatrice du syndicat de l'AOC, note "que leur campagne parle d'huile d'olive méditerranéenne. Mais j'ai bien l'impression que les productions grecques, italiennes et françaises ont été rayées de la carte dans cette histoire".Un état de fait qui, il faut l'avouer, reflète assez fidèlement le marché de l'huile d'olive en Europe.

L'Espagne et ses 1,2 million de tonnes produites en 2010-2011 est le géant du secteur, avec 57% de la production européenne. La France pointe après Chypre, avec... 0,02% du marché. Une production qui, en fait, ne couvre même pas la consommation nationale. "Évidemment, on ne peut pas lutter avec la puissance économique des Espagnols, reconnaît Yves Bernard en s'étouffant devant le budget de la campagne: 16,5 millions d'euros sur trois ans.

"C'est râlant, poursuit-il, mais d'un autre côté, cette tournée, ça peut aussi nous aiguillonner, nous forcer à muscler notre communication." Stéphanie Delaye ne cache d'ailleurs pas qu'elle fera un tour sur le parking du Géant: "On peut toujours apprendre de la concurrence", note-t-elle, belle joueuse. Et elle reconnaît aussi que, quand la tournée passe dans des pays comme le Royaume-Uni, la Belgique ou les Pays-Bas, "tout le monde peut y gagner: ces pays consomment tellement peu d'huile d'olive, que tout effort marketing y est bénéfique".

Même si la France et son positionnement particulier sur des huiles AOC (huit dans l'Hexagone) de qualité n'est vraiment pas le coeur de cible de la campagne du "Roadshow de l'huile d'olive". Toutefois, "ce n'est pas une campagne de promotion des huiles d'olives espagnoles, mais bien de toutes les huiles d'olive européennes", tient à préciser Juan Vicente Gomez Moya, porte-parole de l'opération. Qui ne nie pas que l'événement est porté par l'interprofession espagnole et qui admet aussi que les autres regroupements de producteurs nationaux n'ont pas été associés au projet.

"L'huile d'olive est dans une situation assez particulière, poursuit le spécialiste espagnol. La production a beaucoup augmenté ces dernières années, notamment en Espagne, mais nous pensons qu'il y a une possibilité d'encore faire augmenter la consommation dans les pays de l'Union." Quand un Espagnol consomme en moyenne 14litres d'huile d'olive par an, un Anglais ou un Belge plafonne à un petit litre. La France fait à peine mieux, à un peu moins de 2l. "Dans cette histoire, il faut voir le côté positif, rigole Stéphanie Delaye. Les Espagnols financent une campagne de pub qu'on ne pourrait de toute façon pas se payer..."

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